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Un acteur, un texte, une conviction. C'est tout ce qu'il faut, montre Alum

Il n'y a rien de mal à être vraiment bon dans ce que l'on fait. Il n'y a rien de plus beau qu'un artiste seul sur un sol vide avec rien d'autre que sa musique, son corps et sa voix. Le top trois de mes moments artistiques légendaires : 

  • David Bowie chante Héros sur une scène vide au stade Kuip de Rotterdam (1983). 
  • Frieda Pittoors dans presque tous les rôles à partir de 'Kras' chez Discordia (1987).
  • Jacob Derwig en gentleman de Dostoïevski dans la salle de montage de 't Barre Land (2000).

Ce sont des choses de la vieille école, je l'admets, mais c'est comme ça avec les grands moments : une fois qu'ils sont établis, il est difficile de les faire tomber du trône. Pourtant, ce n'est pas impossible. En effet, juste en dessous de ce sommet se trouvent deux moments apparentés : Mirad, un garçon de Bosnie" d'Ad de Bont dans une salle de classe de Zélande, interprété par Rob Vriens et Marieke van Weelden de Wederzijds. C'était en 1994, il y a donc longtemps, mais vendredi dernier, j'ai vu Victorine Plante et Rochelle Deekman jouer Antigone dans une salle d'école plutôt désolée pour 50 élèves de sixième année du Marnix Gymnasium. 

Transformation

J'y ai revu le miracle qui m'avait déjà frappé il y a plusieurs décennies : c'est précisément dans cet espace vide, où toute décoration est absente, où aucun éclairage fantaisiste ni décor éblouissant ne détourne l'attention, que l'on ressent le mieux la magie de l'art. Quelqu'un se transforme en quelque chose d'autre sans que rien ne change vraiment. La transformation dans sa forme la plus pure, aussi fascinante qu'horrifiante (pour les personnes qui ont des boutons à cause de tout ce que représente le mot "trans").

Cette Antigone d'Alum est plutôt élogieuse revuMais je voulais aller voir comment une telle chose fonctionnait en dehors du contexte sûr d'une salle de théâtre avec un public de théâtre festif. Dans l'ancien auditorium du Marnix Gymnasium sur la Henegouwerplein de Rotterdam, la situation était assez désolante. La salle de ce bâtiment monumental ne s'était pas améliorée depuis que j'y étais moi-même allé à l'école dans les années 1970. Curieusement, les élèves de sixième année ne semblaient pas avoir changé non plus, mais c'était peut-être dû à mon état d'esprit nostalgique. Il était deux heures et demie vendredi après-midi, ce qui n'est pas le moment où la concentration est la plus forte. Rien dans la salle n'aidait à faire venir un théâtre passionnant. 

Profonde sympathie

Pourtant, j'ai finalement assisté à une représentation où tout était parfaitement en place, créant une atmosphère commune entre les deux acteurs et les 50 étudiants qui se sont attardés longtemps après. Rien de maladroit chez les adolescents dans le contramine, qui est en soi le sujet de la pièce vieille de 2 500 ans. La sympathie est intense, chaque tournure du texte est suivie et le moindre mouvement d'acteur est remarqué. J'ai été touchée à nouveau, et plus durement, par un texte que j'ai vu jouer des dizaines de fois.

Opportunisme

La troupe de théâtre Aluin existe depuis le début des années 1990 et a parfois été subventionnée par le Fonds Podiumkunsten, parfois non. Victorine Plante m'a raconté, dans la voiture qui la ramenait à Utrecht, que lors d'une de ces occasions où elle a perdu sa subvention, la compagnie s'est maintenue à flot grâce à des représentations vendues à des écoles secondaires supérieures. Le metteur en scène et auteur/éditeur Erik Snel est un passionné de la Grèce antique, ce qui rend son travail parfaitement adapté aux écoles où l'on enseigne la langue et la culture classiques. Le fait qu'Aluin aligne le répertoire sur les traductions obligatoires de l'examen final est donc un choix judicieux. 

Mais l'opportunisme seul ne permettra pas au club d'y parvenir. Une version de Médée datant de 2013 ne pourra rester au répertoire que si elle est solide comme un roc et qu'elle bénéficie de la meilleure interprétation professionnelle. C'est ce qui s'est passé avec Antigone. 

Persuasion

Les cinquante et un personnes présentes dans cette salle froide de Rotterdam ont soudain compris à nouveau pourquoi un texte peut encore être vivant et dynamique après 2 500 ans. Nous comprenons que Sophocle a écrit autant sur Trump, Poutine et Marjolein Faber que sur les maires oubliés d'Athènes. C'est précisément parce qu'il s'agit d'un régent mythique d'une ville depuis longtemps réduite à l'état de ruines. 

Il ne suffit pas de lire ou de réciter pour y parvenir. En tant qu'acteur, vous devez maîtriser l'art de la transformation à la perfection. Si bien que vous n'avez besoin que de votre corps, de votre voix et de votre conviction pour faire entrer le monde avec 50 adolescents dans une salle froide. 

Je vois trop rarement un théâtre aussi dépouillé et pur dans nos vrais théâtres.  

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Wijbrand Schaap

Wijbrand Schaap

Journaliste culturel depuis 1996. A travaillé comme critique de théâtre, chroniqueur et reporter pour Algemeen Dagblad, Utrechts Nieuwsblad, Rotterdams Dagblad, Parool et des journaux régionaux par l'intermédiaire d'Associated Press Services. Interviews pour TheaterMaker, Theatererkrant Magazine, Ons Erfdeel, Boekman. Auteur de podcasts, il aime expérimenter les nouveaux médias. Culture Press est l'enfant que j'ai mis au monde en 2009. Partenaire de vie de Suzanne Brink colocataire de Edje, Fonzie et Rufus. Cherchez et trouvez-moi sur Mastodon.Voir les messages de l'auteur

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