Avec leur nom, les cinq Japonais du contact Gonzo font référence au journalisme gonzo par le regretté Hunter S. Thompson. Brut, dur et subjectif. Thomspon a également montré comment il travaillait dans ses pièces. Contacter Gonzo s'échauffe pendant le spectacle, prend des clichés les uns des autres avec des appareils photo jetables et se passe la bouteille d'eau. Style GonzoCe que tu vois est ce que tu obtiens.
Contact Gonzo respecte des règles simples. Par exemple la gravité : sauter et redescendre. Ou l'attraction et la répulsion : pousser, tirer, comme dans une mêlée de rugby. Ce faisant, ils se rapprochent de l'art minimal qui adhérait à un ensemble de paramètres ; on pense à Sol LeWitt.
Au début, on a l'impression que c'est de la comédie burlesque. Tu glousses lorsque tombent des coups dévergondés, dont l'impact est audiblement douloureux. Il s'agit d'arts martiaux, de capoeira à la japonaise, avec une dent dans la lèvre et une jambe molle après. L'ouïe en perd beaucoup lorsque Sayaka Himeno fait son rapport. Aussi fragile qu'elle en a l'air, elle s'attaque aux cymbales et aux peaux de tambour dans un solo de batterie punk frénétique. Pas de surprise, pour ceux qui ont entendu son groupe. Nisennenmondai sait.
Contact Gonzo, c'est du contact improvisation à l'état pur. Certains regrettent l'arc de tension ; d'autres apprécient le jeu libre et l'absence de messages imposés. Soit tu prêtes une attention particulière à Himeno après son ascension, soit tu te laisses absorber par un "duo" pour tambour et quatre hommes, soit tu te mets les doigts dans les oreilles et tu ne prêtes attention qu'au mouvement. Contact Gonzo ne choisit pas. Faiblesse ou force ? C'est au spectateur de décider.
Ce qui est particulièrement frappant, c'est la confiance aveugle que les quatre hommes ont les uns envers les autres. Tout comme l'esprit sportif qui règne sur un ring de boxe thaïlandaise permet de se donner des coups de poing et de pied noirs et bleus (et surtout pas en dehors de ce cadre) ; l'aspect intensément physique de ces coups dévergondés a aussi presque quelque chose de fraternel ou d'amical. Ce n'est qu'avec des personnes qui respectent totalement les règles de base (du jeu) que l'on peut arriver à un... muay thaiTu peux aussi organiser un spectacle comme celui-ci.
Les cinq danseurs entrent dans le centre-ville d'Utrecht peu après l'événement. Ils rendent cette insécurité par des représentations ponctuelles. Celle-ci est suivie d'une autre représentation au Stadsschouwburg. Contact Gonzo lèche les blessures et les bleus le lendemain. Les visiteurs demandent : "Est-ce que c'était de la maîtrise conceptuelle ou des choux de singe (même : une cage de singe sans appareils) ? Dans une performance impressionnante et conflictuelle, ces Japonais ne répondent pas, et c'est là seulement que se trouve la main de cinq vrais maîtres. Un vieux moine zen dit : "La réponse précède la question".
Vu : contact Gonzo, Stadsschouwburg, Utrecht, mercredi 20 avril 2011. Encore à voir : jeudi 21 avril à 19h30.
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