Dans la minute 1 de CRACKz (Dança Morta) il est déjà touché. Les danseurs du Grupo de Rua de Niterói tourbillonnent dans la Zuiveringshal West de la Westergasfabriek en s'appuyant sur une main. L'espace semble fait pour cette performance. Les danseurs s'élancent dans les airs, font des sauts périlleux sur le côté et tournoient sur le sol brillant. Ce sont de courts épisodes, chacun se terminant par l'extinction des lumières. Tout ce qu'ils peuvent faire, ces danseurs de rue. C'est un monde où les possibilités du corps humain ne semblent limitées par rien. Parfois, ce sont des créatures issues d'un dessin animé, et à chaque fois, tu dois te rappeler que ce sont de vrais danseurs de chair et de sang, avec une maîtrise inégalée de leur art.
Les scènes se succèdent en glissant. Comme des vagues, les danseurs se déplacent en formation sur le sol et reviennent. L'ensemble prend quelque chose de raréfié, d'où s'évapore la dureté du hip-hop. D'un regard sans prétention, les danseurs se détachent à chaque fois du mur latéral pour se plonger dans la danse. Aucune trace de bravade. C'est inhabituel pour de la danse de rue.
Le chorégraphe brésilien Bruno Beltrão montre bien plus que les trucs si rapidement marqués dans la danse de rue et le hip-hop. Il a été profondément inspiré par la danse de rue de Rio de Janeiro. Il en a incorporé des éléments dans une sorte de danse moderne extrêmement rafraîchissante et légère. Plus tard dans le spectacle, les mouvements deviennent moins éclatants qu'au début. L'espace devient plus sombre et la danse plus introspective, notamment lorsque les danseurs se glissent sur la scène dans une position voûtée. Pourtant, curieusement, la danse ne perd rien de la sophistication et de l'excitation introduites par la pure danse de rue du début. Les mouvements sont parfois lents, mais les secousses subtiles qui traversent les membres maintiennent la tension à son comble. En raison de la faible lumière, tu ne vois souvent que des silhouettes, avec une interaction privée entre elles qui les maintient au sommet de leur concentration. Beltrão aurait aussi pu copier ces figures mystérieuses de la rue avec leurs coins sombres.
CRACKz (Dança Morta) est original, créatif et surprenant. C'est précisément parce que tu es d'abord écrasé par les mouvements de danse de rue impeccablement exécutés et inhumainement intelligents, que tu es ensuite entraîné dans les scènes plus sombres avec une excitation supplémentaire.
Cela vient naturellement, et cela est dû à la sublime unité de style et d'atmosphère qui est soutenue tout au long de la représentation par la variété et la richesse des mouvements.
Bruno Beltrão et Grupo de Rua de Niterói, CRACKz (Dança Morta). Vu : 17 juin, Westergasfabriek, Zuiveringshal West. Encore à voir sur place : mardi 18 juin, 20h30.