La pièce de théâtre "Heart" est une pièce pour toi. liste de choses à faire. En d'autres termes, la pièce "Heart", créée par Matzer Theatre Productions en tant qu'adaptation du livre de Lisette Lewin "Heart of Barbed Wire", est une pièce que tu dois vraiment avoir vue. Pourquoi ? Je vais te donner 4 raisons.
1 : Le livre n'est plus en vente
En 1992, Lisette Lewin a écrit un livre qui fouillait de façon festive les plaies fraîchement ouvertes de la Seconde Guerre mondiale. 10 ans après le film Shoah et la pièce de Judith Herzberg "Leedvermaak", les Pays-Bas commençaient lentement mais sûrement à se faire à l'idée que "nous" n'avions pas tous été dans la résistance pendant l'occupation allemande. Lisette Lewin y a ajouté la sympathie du lecteur pour une femme dont la vie, selon les anciennes normes, ne pouvait se résumer qu'à une super-défaillance : haineuse des juifs avant, putain boche pendant, et ange vengeur personnel avec une fausse identité juive après la guerre.
Grâce au style narratif sobre et fluide, tu te surprends à ne pas condamner la femme, mais aussi à ne pas pouvoir l'approuver, alors qu'elle entre dans ta tête. Les livres peuvent faire ça : entrer dans ta tête comme ça. Ce livre n'est donc plus en vente, et l'éditeur doit faire quelque chose.
2 : Matzer est le meilleur éditeur de livres
Madeleine Matzer comprend ce qu'il faut pour amener un livre sur la scène. Car c'est plus difficile que tu ne le penses. Tu ne peux pas simplement mettre les dialogues à part et y coller des acteurs. Les personnages littéraires sont généralement trop complexes pour cela, en fait. Dans ce cas, en répartissant le rôle principal et le rôle de la narratrice du livre entre deux actrices, tu rends justice à autant d'aspects du livre que possible : le caractère multicolore, la distance ironique de la narratrice et le... baise l'esprit ce qui, bien sûr, est toujours le cas de la lecture : toi, le lecteur, tu lis les mots et ils deviennent donc tes mots. Que tu le veuilles ou non.
L'astuce qui consiste à répartir un personnage littéraire entre au moins deux acteurs n'est pas une invention des Matzer, mais ils y sont parvenus avec beaucoup de finesse.
3 : Wendell Jaspers vaut toujours la peine d'être visité
Dès que je l'ai vue lancer des bières en tant qu'élève de l'école d'art dramatique lors d'une pièce de théâtre turbulente pour la jeunesse dans la ville toujours ensoleillée d'Almere, il était clair que Wendell Jaspers allait faire parler d'elle. L'actrice a le look androgyne qui peut transformer les gens en stars. Elle est rebondissante et légère, mais elle a un côté sombre qui donne de la profondeur à chaque rôle qu'elle joue. Du moins, tant que le réalisateur la laisse mettre l'accent sur ce côté lumineux : ceux qui ne prêtent attention qu'à l'obscurité n'ont pas réussi. Madeleine Matzer, l'homonyme de la compagnie qui présente 'Heart', laisse briller Wendell Jaspers. Nous avons déjà assez de noirceur.
4 : Le ton.
On l'a déjà dit, mais on ne le répétera jamais assez : ce qui rend le livre et le spectacle uniques, c'est le ton. L'histoire est mauvaise, le narrateur fait des choses terribles, mais nous demande de ne pas juger. Nous devons la comprendre, sans comprendre. Lisette Lewin ne lève pas le petit doigt moral, reste factuelle sans devenir froide et nous met au défi de zoomer sur la vie privée sans déverser tout le temps le malheur de l'holocauste sur les événements. Cela demande une capacité très particulière, qui n'a rien à voir avec le pardon, mais tout à voir avec la sagesse. D'autres aiment encore ajouter cette fatalité, et ce faisant, ils détruisent tout. Le fait que cette pièce de Matzer reste légère, et qu'elle soit même risible ici et là, est un méga exploit, et ça marche.
N'y a-t-il donc rien à critiquer dans cette performance ? Malheureusement, il y en a. Les vêtements. La coupe. N'y a-t-il plus aucun tailleur sous les grandes rivières qui sache faire une coupe décente ?
Hart est encore à voir dans un théâtre près de chez toi. Trouve ton émission.
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