Un spectacle merveilleux, plein d'hilarité, de suspense et de légèreté, qui m'a pourtant renvoyée dans le monde avec un sentiment de tristesse. Il semble que les quatre femmes de D3US/XM4CHIN4 du chorégraphe et metteur en scène Fernando Belfiore se retrouvent au pays des possibilités infinies. Ils peuvent tout faire. Veulent-ils aussi tout ? Sont-ils encore eux-mêmes s'ils peuvent tout faire ?
Que ressent-on lorsque la terre bourdonne dans ses profondeurs à chaque pas que l'on fait ? C'est délicieux. C'est la toute-puissance. Un conte de fées. Un rêve. Mais est-ce vraiment vos pas qui provoquent ce bruit sourd, ou ceux de quelqu'un d'autre ?
Deux forces tirent les femmes vers le bas : le désir sexuel et la technologie qui rend la vie tellement plus facile.
Il semble que le sexe n'ait plus de secret pour les quatre personnages. Tout ce qu'ils font. Le sexe à outrance. À la manière d'un prédateur, ils se déplacent sur scène, séduisants, supérieurs, durs, sadiques, meurtriers. Ils recherchent l'intimité, la proximité. Ils veulent du vrai. Les frontières s'estompent. Ils grimpent même sur les gradins, se faufilent dans le public et embrassent certains spectateurs. Il n'y a pas plus proche que cela.
Pourtant, leur jeu se déroule loin d'eux. Ils en font un spectacle brillant et clinquant, avec toutes les règles, les exigences et les clichés qui accompagnent un spectacle. L'intimité et l'authenticité sont profondément escamotées. L'érotisme se transforme en scènes choquantes et dégradantes qui n'ont rien à voir avec la réciprocité. Les femmes se retrouvent avec des visages anxieux et des corps tassés. En proie au désir de se plier à ce que la société leur impose.
Tuyau Hoover
Ils livrent également des gadgets techniques. L'humanité rêve de soumettre le monde entier à ses désirs. Un appareil à roulettes rend la marche inutile. Silencieusement, l'une des femmes glisse sur la terre. Une perceuse fait tourner les fleurs et un tuyau d'aspirateur sert aussi de microphone. Là encore, la frontière s'estompe : entouré de toutes ces commodités techniques, le corps de chair et d'os devient une machine. Les quatre femmes sont perdues entre leurs propres désirs et ceux réalisés par l'homme. Des images féroces de ce que devrait être le sexe, des inventions et des inventions qui sont censées rendre la vie encore plus brillante : il y a tant de choses. Retrouvez-vous dans ce film.
Belfiore et les interprètes m'ont entraîné sans effort dans cette expérience compliquée et déroutante. D3US/XM4CHIN4 possède une légèreté et un humour particuliers, à travers lesquels les grimaces du mécontentement apparaissent sans heurt. Luna Eggers Matz, Rozemarijn de Neve, Maria Metsalu et Jija Sohn sont les parfaites interprètes de cette performance : pleines d'esprit, séduisantes, intrigantes par l'abandon avec lequel elles se lancent dans leur jeu.
Vu : 30 septembre 2016, Dansmakers Podium, Amsterdam. Encore à voir : 1er octobre
Photos : Paul McGee