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Alain Platel met tout le Carré en émoi avec Nicht Schlafen #HF17

Les plofnies sont arrivées de manière totalement inattendue. Le père de famille derrière moi, sorti avec sa femme et son fils adolescent vraisemblablement réticent, a éclaté au bout d'une dizaine de minutes de spectacle. Alors qu'un silence assourdissant s'était installé dans la salle comble du Théâtre Carré. Au moins quatre personnes, dont moi-même, ont été profondément choquées. Je n'avais jamais éternué aussi fort, mais je n'avais jamais non plus connu un tel silence dans "Nicht Schlafen" d'Alain Platel. Et je vais souvent au théâtre.

La soirée avait commencé en douceur. La promenade estivale à vélo le long de l'Amstel et des parcs et terrasses bondés de la Weesperzijde n'a été que brièvement privée de son idylle lorsqu'une voiture a fait un geste un peu trop imprudent. Il suffit d'un éclair de Londres, d'un signe de la main et d'un "désolé" pour que la vie reprenne son cours. Mais nous sommes plus vigilants que d'habitude. Nicht Schlafen, la pièce avec laquelle Platel, l'enfant prodige flamand de la danse, est au Holland Festival cette fois-ci, joue sur ce thème.

Abattoir

Et comment. Sur une scène dominée au repos par une sculpture de carcasses de chevaux, Platel place ses danseurs dans la peau de visiteurs de musée. D'abord silencieux, puis, une minute après l'extinction des lumières de la salle, ce petit groupe silencieux s'est transformé en bagarre. Une minute après l'extinction des lumières de la salle, ce petit groupe silencieux s'est transformé en une foule qui se bat. Ils ne s'épargnent pas les uns les autres, même si le sang ne coule pas. L'effet de la violence insensée est bien traqué lorsque les danseurs s'arrachent les vêtements les uns des autres. Les regards des neuf danseurs, huit hommes et une femme, sont amers, agressifs. Et puis il y a ce silence.

Une telle ouverture, avec des flocons de testostérone qui volent dans la salle comme quelques vêtements, rend tout Carré à la fois éveillé et alerte. On edge", disent les Anglais, et chaque son est alors un son de trop. Dans cet état, il est étonnant que nous n'ayons pas tous lynché l'éternueur solitaire.

La conduite de la mort

Le spectacle est tissé d'un fil de pulsion de mort, mais si joliment imaginé qu'il vous tient en haleine et vous empêche de dormir. La composition du groupe y contribue également. Toutes les couleurs de l'arc-en-ciel sont représentées, l'Israélien portant parfois un béret et l'Arabe un bonnet blanc sur la tête. Platel joue avec insistance sur notre propre méfiance.

Ce groupe chargé danse sur les tonalités les plus féroces des œuvres les plus lourdes de Gustav Mahler, jouées avec le bouton de volume à dix pour l'occasion. Entrecoupés de paysages sonores de la nature, ces sons créent une atmosphère qui est presque trop forte. Platel n'est déjà pas le plus subtil dans ses chorégraphies, et avec Mahler en pleine guerre, le bois dans lequel les planches sont coupées ici est peut-être un peu trop épais.

Les strip-teaseuses de la salle de sport

Mais j'insiste sur le fait que l'importance du film compense cette surenchère potentielle. Plus que dans la maison hantée de Dries Verhoeven, ailleurs dans ce Holland Festival, Nicht Schlafen vous fait prendre conscience de l'attrait de la violence et de la beauté de l'agression pure. Il n'y a pas de strip-teaseuses faibles sur scène, comme sur Mercatorplein, mais de beaux corps athlétiques. Des corps qui vivent de cette énergie. Des corps qui peuvent donc aussi être très menaçants, même si, à la fin, la relativité et l'humour sont autorisés et que le sérieux cède la place à la détente.

Les applaudissements sont houleux. Devant les portes du Carré, un cycliste enragé s'est frayé un chemin dans la masse des spectateurs encore un peu abasourdis par la lumière du soir, au milieu de la rue.

Dormeur

Dans le train du retour, je suis assis en face d'un grand vieillard en costume trois pièces. Il dort profondément. À ma gare, je ne l'ai pas réveillé pour vérifier s'il n'avait pas lui aussi besoin d'être ici. J'avais l'esprit trop ailleurs. Ainsi, monsieur, si vous êtes arrivé hier à Maastricht par le dernier train, contre votre gré, alors que vous deviez être à Utrecht, j'aurais pu vous sauver en vous disant gentiment "ne dormez pas". Mais Platel s'est interposé.

Bon à savoir
Vu : Nicht Schlafen au Théâtre Carré, Amsterdam. Encore là : mercredi 21 et jeudi 22 juin. Informations.

Wijbrand Schaap

Journaliste culturel depuis 1996. A travaillé comme critique de théâtre, chroniqueur et reporter pour Algemeen Dagblad, Utrechts Nieuwsblad, Rotterdams Dagblad, Parool et des journaux régionaux par l'intermédiaire d'Associated Press Services. Interviews pour TheaterMaker, Theatererkrant Magazine, Ons Erfdeel, Boekman. Auteur de podcasts, il aime expérimenter les nouveaux médias. Culture Press est l'enfant que j'ai mis au monde en 2009. Partenaire de vie de Suzanne Brink Colocataire d'Edje, Fonzie et Rufus. Cherche et trouve-moi sur Mastodon.Voir les messages de l'auteur

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