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Avec le trait français : Cappella Amsterdam chante Ton de Leeuw

Ton de Leeuw a vécu à Paris pendant la dernière décennie de sa vie et a étudié avec Olivier Messiaen dans ses jeunes années. À 21 mai Cappella Amsterdam présentera quatre de ses œuvres chorales en français au Muziekgebouw aan 't IJ. Le programme comprend également des œuvres de son élève et ami Daan Manneke et du jeune compositeur français Laurent Durupt. Huit questions au chef d'orchestre Daniel Reuss et au compositeur Daan Manneke.

Ton de Leeuw est considéré comme l'un des plus grands compositeurs du siècle dernier. Qu'est-ce qui le rend si spécial ?

Reuss :

Il ne fait aucun doute que Ton de Leeuw est l'un des plus grands compositeurs néerlandais. Il a conçu un système musical qui lui est propre, influencé par la musique orientale. Il y a créé une musique très cohérente et méditative qui est harmonique et orientée vers le français. Il a également écrit beaucoup de musique vocale en français.

Manneke :

Ton de Leeuw était un professeur internationalement recherché et estimé : les gens affluaient à Amsterdam du monde entier pour étudier la composition avec lui. J'avais suivi un cours d'esthétique musicale avec Olivier Messiaen en 1968, et j'ai reconnu chez De Leeuw la même attitude non dogmatique et ouverte à l'égard de la composition. Il était clair pour moi qu'il devait être mon nouveau professeur. Dans notre pays, il était considéré comme idiosyncrasique et peu orthodoxe, parce qu'il s'éloignait des styles courants. Il a développé sa propre voix, plus axée sur l'exposition que sur le développement.

Ton de Leeuw
Ton de Leeuw

Il a lui-même comparé sa méthode de composition au fonctionnement d'un kaléidoscope. Le motif semble dynamique parce que la palette de couleurs change constamment, mais aucune couleur n'est ajoutée, ni soustraite. C'est un ensemble qui se renouvelle de lui-même, créant ainsi l'illusion du mouvement. Il a ainsi créé une expérience circulaire du temps, comme une sorte d'"éternité" dans un escalier musical en spirale. Ton m'est très cher ; en guise d'hommage, j'ai écrit ma Tombeau pour Ton de Leeuw 1926-1996à laquelle mon dernier CD nommé.

Comment expliques-tu que sa musique soit pourtant jouée relativement peu souvent ?

Reuss :

C'est en effet un mystère de savoir pourquoi son œuvre est si rarement programmée, car à chaque fois que Cappella Amsterdam l'interprète, le public est très impressionné. C'est une musique accessible et de belle sonorité que tout le monde reconnaît immédiatement.

De Leeuw a étudié avec Messiaen, est-ce que cela se ressent dans sa musique chorale ?

Reuss :

Messiaen a composé dans un système différent, mais en Elégie pour les villes détruites on entend des accords à la Messiaen. En fait, le langage de son maître est généralement plus dissonant et exubérant, peut-être aussi en raison de ses origines catholiques. Messiaen n'a pas peur des effets grandioses, De Leeuw écrit avec plus de prudence et de retenue.

Ton de Leeuw a étudié la musique indienne et d'autres musiques orientales. Cela a-t-il influencé ses propres compositions ?

Reuss :

Certes, tu peux clairement l'entendre dans sa musique. Entre autres choses, il travaille avec l'hétérophonie, des mélodies à l'unisson qui déraillent, par exemple à la fin de... Car nos vignes sont en fleur. Et dans l'utilisation d'effets de type gamelan, l'influence de l'Indonésie est facilement reconnaissable.

Parallèlement à la musique de Ton de Leeuw, on entendra également des Psaumes de Daan Manneke. Y a-t-il des interfaces musicales ?

Reuss :

Manneke a développé son propre style, mais dans ses premières œuvres, on peut entendre un lien avec De Leeuw ; plus tard, il s'est davantage aligné sur quelqu'un comme Arvo Pärt. Un autre lien est que Manneke a également écrit de nombreuses pièces en français.

Manneke
Daan Manneke

Manneke :

Je pense que ma musique a des points communs avec celle de Ton de Leeuw. Il s'agit par exemple de l'utilisation de la modalité plutôt que d'un système atonal rigide. Nous avons également tous les deux un sens de la pensée vocale et linéaire et une sonorité "romane" avec de longues lignes de cantando. Nous partageons également un penchant pour la langue française, qui génère une certaine élévation et monumentalité.

Quarante ans séparent la création du Psaume 121 et du Psaume 122 par Daan Manneke. Sont-ils similaires ou très différents ?

Manneke :

J'ai grandi à Zeeuws-Vlaanderen et j'ai écrit le Psaume 121 à l'âge de 21 ans pour une chorale d'église catholique de Sint Jansteen. Dans cette œuvre de jeunesse, on peut entendre des influences de Francis Poulenc, des débuts de Messiaen et d'Hugo Distler, ainsi que de Sweelinck et du Psautier de Genève. Bien que j'aie eu peu d'outils de composition à l'époque, la pièce a été incluse dans une anthologie d'un grand éditeur. Elle est encore chantée quelque part dans le monde chaque semaine, un exploit de la chance du débutant.

Bien qu'une demi-vie sépare les deux cadres, pendant laquelle j'ai également écrit de la musique d'avant-garde, il y a des similitudes. Par exemple, dans l'utilisation de la modalité, la sonorité du français et le beau symbole du nombre quarante. Mais le Psaume 122 est beaucoup plus nuancé, symphonique et luxuriant. Le texte en donne également la raison. Pour faire une comparaison avec la musique instrumentale : tu pourrais considérer le 121 comme un "quatuor à cordes" et le 122 comme un "orchestre symphonique". En d'autres termes, 121 est protestant et 122 est catholique.

Il y aura aussi une pièce du jeune compositeur français Laurent Durupt, que je connais surtout pour ses expériences sonores électroniques. Quelle est sa place dans le programme ?

Reuss :

Durupt forme un élément de contrepoint. Il a écrit une pièce sonore, plus une étude d'harmoniques qu'une composition avec du matériel musical. Il y a un lien avec De Leeuw, car tous deux travaillent avec des harmoniques, mais Durupt utilise en fait le chant harmonique, ce que l'on n'entend pas chez De Leeuw.

Lequel de ces trois compositeurs écrit le plus naturellement pour la voix humaine ?

Reuss :

La musique de De Leeuw et Manneke est écrite très naturellement pour la voix humaine. De Leeuw utilise en Car nos vignes sont en fleur soit dit en passant, les quarts de ton, que nous connaissons surtout grâce à la musique des pays asiatiques et arabes. Le chant harmonique que nous présente Durupt n'est pas non plus courant chez nous, mais l'est dans d'autres cultures, comme en Mongolie. Durupt est un peu plus expérimental que les deux autres, même si en cela il renvoie aux années 1970. Elégie pour les villes détruites de Ton de leeuw est une pièce mûre réalisée par un véritable maître.

Thea Derks

Thea Derks a étudié l'anglais et la musicologie. En 1996, elle a terminé ses études de musicologie cum laude à l'université d'Amsterdam. Elle s'est spécialisée dans la musique contemporaine et a publié en 2014 la biographie 'Reinbert de Leeuw : man or melody', saluée par la critique. Quatre ans plus tard, elle a terminé 'Un bœuf sur le toit : la musique moderne dans le vogevlucht', qui s'adresse surtout aux profanes intéressés. Tu peux l'acheter ici : https://www.boekenbestellen.nl/boek/een-os-op-het-dak/9789012345675 En 2020, la 3e édition du Reinbertbio est parue,avec 2 chapitres supplémentaires décrivant la période 2014-2020. Ceux-ci sont également parus séparément sous le titre Final Chord.Voir les messages de l'auteur

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