Un prologue, deux dialogues et un long interlude. Le tout clairement lié. Dans une interprétation de Romeo Castellucci - on ne peut pas faire plus fou.
Le dramaturge italien Castellucci préfère faire du théâtre qui n'est pas facile à comprendre, voire incompréhensible. Ce faisant, il ne recule pas devant les effets de choc. L'aspect visuel est impressionnant, mais la ligne claire est souvent difficilement reconnaissable. Cela promet donc quelque choseIl s'agit d'une nouvelle étape dans l'histoire de l'Union européenne, alors qu'il s'attaque à la question de la sécurité. La démocratie en Amérique. Zeker avec l'actualité en tête : Donald Trump.
Mais l'émission ne porte pas sur le 45e président des États-Unis. Ni sur la démocratie en Amérique. Elle porte en revanche sur le livre éponyme d'Alexis de Tocqueville. Mais il ne s'agit pas non plus de ce qui continue à fasciner les juristes. Castellucci se concentre entièrement sur l'essentiel : l'Amérique en tant que tabula rasaoù une nouvelle démocratie est née de la pensée puritaine.
Glossolalie
Après une explication sur la glossolalie ("parler en langues"), le spectacle commence comme on s'y attend de la part de Castellucci : bruyant et absurde. Onze "majorettes" vêtues d'uniformes blancs agitent des drapeaux. Sur ces drapeaux figurent des lettres qui forment d'abord "Democracy in America", puis des variantes plus absurdes comme "Car Comedy in America" et "Cocain Army Medicare". Des mots qui ont un sens, mais qui, comme la glossolalie, sont totalement dénués de sens dans ce contexte.
Dans la première scène, une famille de paysans pauvres continue de croire que Dieu lui donnera ce dont elle a besoin. Lorsque les récoltes échouent les unes après les autres, la femme du fermier vend sa petite fille malade en échange d'outils. Elle perd la tête et commence à prononcer des mots indiens.
Des danses de voyage ombrageuses
Dans le long intermède de danse qui suit, nous assistons à des danses de rangées traditionnelles derrière plusieurs couches de rideau de gaze. Toutes sortes de traités et d'événements historiques des débuts de la démocratie américaine sont projetés sur l'écran avant. L'association avec les rituels de fertilité et la naissance d'une nation est évidente. La scène se termine par une danse complètement abstraite, composée de deux objets flottant dans l'espace. La danse a commencé à parler en langues.
Le début de la dernière scène renvoie proprement à la première. Une Indienne demande ce qui est arrivé à l'enfant blanc. Elle parle la langue des Indiens Ojibweg, une langue sonore totalement méconnaissable pour nous, qu'elle ne veut pas échanger contre l'anglais des visages pâles.
Vide
La structure du spectacle est évidente. Il en va de même pour la raison pour laquelle la scène est nue et vide pendant toute la durée du spectacle. Castellucci est-il vraiment devenu si transparent ?
Et puis on se rend compte que cette performance est aussi ironique qu'un livre de Jean Baudrillard, compatriote de De Tocqueville. Il a parcouru l'Amérique deux siècles après De Tocqueville et a écrit à ce sujet Amériqueune ode au vide sur le nouveau continent. Il contient le meilleur résumé de cette performance : "La liberté de mouvement du corps associée à l'espace dont ils disposent compense la simplicité de leur apparence et de leur caractère. Vulgaire, mais "facile".